De retour de la 6ème réunion de l’ISO 26000

La 6ème réunion plénière du GT en charge de l’élaboration de lignes directrices sur la responsabilité sociétale des organisations (ISO 26000) applicables par tout type d’organisation, vient de s’achever à Santiago du Chili le 5 septembre 2008.
426 experts et 170 observateurs participent au processus représentant 84 pays (28 pays développés et 48 en développement) et 40 organisations dites en liaison dont de nombreuses organisations internationales et des ONG. Les travaux ont commencé en mars 2005 et devraient s’achever en 2010. Tous les documents sont en accès public (www.iso.org/wgsr). La prochaine réunion aura lieu pendant la seconde quinzaine de mai 2009 à Québec.

Un large consensus s’est dégagé sur le texte actuel (WD4.2) et les orientations des améliorations de rédaction à apporter, mais quelques questions concentrent la négociation à venir :
La façon dont le texte fait la référence aux normes internationales et les textes internationaux (identifiés dans le texte sous le vocable : normes internationales de comportement) et les autres documents nommés « initiatives » qui seraient dans l’annexe et pas dans le texte lui-même.
Les relations avec l’OMC et les éventuelles barrières non tarifaires au commerce : Les Etats Unis ont souhaité introduire une clause excluant la prise en compte de l’ISO 26000 dans les litiges notamment devant l’OMC ou comme une pression pour faire évoluer le droit national et les traités internationaux. Cette proposition n’a pas été reprise du fait du statut du document : lignes directrices non certifiables. Les Etats Unis ont fait état d’une « opposition soutenue » à ce refus.
La gestion des conflits entre droit national et conventions internationales : Le texte propose d’utiliser les normes internationales en absence de cadre légal national et autant que possible s’y conformer en cas de contradiction. La Chine a fait état de son opposition sur les questions de barrières au commerce et de normes internationales de comportement.

A ces réserves près, la réunion de Santiago a décidé que les travaux ISO 26000 était suffisamment avancés pour donner les orientations et le mandat au comité de rédaction (IDTF) de préparer un Commitee Draft (CD). Cette étape décisive donne le rôle central aux organismes nationaux et aux comités miroirs qu’ils ont mis en place. Les commentaires qui auront le plus de chance d’être repris devront être communs à plusieurs pays, ce qui rend important les coordinations entre pays, notamment francophones.
Le processus étant engagé dans une étape irréversible la question de tester son application de façon expérimentale peut être envisagé. Signe que les travaux de l’ISO 26000réliminaire à la réunion vont sortir du réseau des experts jusque là mobilisés, le succès des inscriptions au séminaire organisé par l’AFNOR et différents partenaires au Conseil Economique et Social le 2 octobre, il y a deux fois plus d’inscrits que de places.

J’ai participé à un séminaire préliminaire qui s’est tenu le 29 septembre à Santiago avec les représentants des gouvernements. Il a, à la fois, montré comment les organisations gouvernementales se sont emparées de la responsabilité sociétale mais aussi que les gouvernements avaient des responsabilités particulières qui ne les plaçaient pas comme des parties concernées comme les autres. On notera l’intervention de l’armée chilienne qui a une politique de responsabilité sociétale.
N’étant plus représentant officiel du gouvernement français (sans être remplacé pour l’instant) je continuerai à participer aux travaux pour la francophonie, j’ai d’ailleurs été élu président du réseau francophone de l’ISO 26000 avec comme coprésident Kouame Joseph Attoungbre de Côte d’Ivoire. Ce réseau francophone (French speaking Task Force (FTF)) se réunit régulièrement avec un statut officiel dans le processus. Il permet à la fois d’assurer la bonne compréhension des débats et le renforcement de capacité des pays francophones dans l’élaboration du document, mais aussi de veiller à une bonne traduction du document en menant les discussions terminologiques nécessaires (le texte en français fera référence au même niveau que le texte en anglais). Les pays francophones en développement les plus actifs sont la Côte d’Ivoire, le Maroc, le Sénégal et le Cameroun, mais Madagascar, Burkina Faso viennent de rejoindre le processus. L’organisation de la 7ème réunion plénière de l’ISO 26000 à Québec renforce la pertinence d’évoquer la question de la RSE au sommet de la francophonie du 17 au 19 octobre de façon plus large que la transparence des industries extractives proposée actuellement par le Canada. Il est souhaitable que la France soutienne les demandes du Québec en ce sens.